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Calamity Kane et Stun Lee (Finale du 24 fevrier)

Texte de Calamity Kane et dessin de Stun Lee

Le texte et le dessin ont été réalisé sous multiples contraintes en 10 minutes.

Deux petits personnages de poche étaient attablés dans l’un des derniers bastions de l’orient express, palais fumant, courant dans la pampa à toute pompe. L’un deux, à la face d’origami coupante, faisait jouer son opinel le long d’un mouchoir aux pliures fraternelles. Longtemps je regardai ce petit pape tranquille, que l’incendie perceptible par les fenêtres du wagon ne décourageait pas dans sa quête désespérée d’un petit bout de pain. Seule nourriture terrestre qui demeurait dans son assiette, tandis que l’orage de feu grondait dehors, et le train toujours fumant brisait l’étreinte de l’incendie dans un crissement de métal chanté haut. Ce soir là, le soleil, orgueilleux, avait fondu sa couleur dans les flammes et s’était couché de bonne heure. A y regarder de plus prés, le pape solitaire avait dans son assiette le dernier bout de doigt du cuisinier. À force de travailler dans la dark kitchen de la bourgeoisie, le dernier des prolétaires était devenu aveugle. On l’avait cuisiné. Assis aux côtés de ce cardinal géométrique et anthropophage , un personnage à la face phallaude, facile, un personnage dont l’essence même relevait du glaire. Il ne faisait nul doute qu’enfant, sa mère ne l’avait pas bercé, sa mère ne l’avait pas embrassé, sa mère ne l’avait pas accouché, non, sa mère l’avait craché.
Comme si le noyau de la terre, prit d’une ultime quinte de toux, avait expulsé ce petit être frustre au milieu du grand feu de la vie. Il s’étalait de tout son or, gluant et abstrait, au milieu de la fournaise. Ecumant, cherchant, palpant, gémissant et ouvert, pleurant avait douceur comme le dernier des enfants obèse et gâté à naître. Il réclamait à grand cri toutes les richesses dont il avait abusé et qui avaient fondues, en même temps que le soleil.